On va le dire tout de suite - et en do majeur - pour ne pas laisser de place à une éventuelle controverse : c’est de la faute des guitaristes, pas de la chanson. De quoi parle-t-on ? D’un phénomène qui aurait pu aisément figurer dans , ces gens qui débarquent en soirée (ou en pique-nique, ou à un quelconque rassemblement) avec une guitare non sollicitée et qui, à un moment, entonne (mal) Wonderwall.

Le tube d’Oasis aura bientôt trente ans mais la récente et soudaine annonce de pour pourrait donner envie à certains de Wonderwall. A part l’évidente volonté de nuire à autrui, y a-t-il des raisons objectives à cette popularité de Wonderwall ?

Pas si simple

La raison qui vient immédiatement à l’esprit – surtout quand on a une rancœur à l’égard de ces crâneurs de guitaristes –, c’est la facilité du morceau. « Non, elle n’est pas si facile, tranche Géraldine Pégard, prof de guitare à Saint-Quentin. Il n’y a que six accords, plutôt simples, mais . Et puis six accords, c’est plus que beaucoup de chansons pop… » Christophe, vendeur de guitares près de Versailles, confirme : « Franchement, en chanson pop, il y a plus simple. Certains morceaux des Beatles ou de Nirvana par exemple. Mais Wonderwall, on peut la jouer mal, elle sonnera quand même, et les gens la reconnaîtront tout de suite. »

Même son de cloche (ou plutôt, son de corde, british humour), chez Véronique, accompagnatrice de chorale amateurs. « C’est une chanson assez facile à chanter et entraînante. Même les chanteurs qui ne savent pas trop moduler leur voie pourront donner de la vie au refrain. »

« C’est une chanson qu’on peut jouer lentement si on n’est pas à l’aise, elle marche quand même, complète Géraldine Pégard. Et on peut se lâcher sur le refrain, qui est assez facile, et qui permet de faire chanter les gens en chœur. »

« C’est juste irritant »

Pas trop difficile et archiconnue, voilà donc le secret de Wonderwall, qui est aussi . D’ailleurs, la popularité de la chanson est aussi sa malédiction. « Pour les fans d’Oasis, c’est réducteur de ne penser qu’à cette chanson à propos du groupe, explique Christophe. Et les autres, ben ils sont saoulés de l’entendre encore et encore. Donc la chanson est un peu maudite. »

« C’est le principe d’une bonne chanson pop, et même sa raison d’être, de fédérer les gens et d’être simple à jouer et chanter, estime notre cheffe de chœur Véronique. Mais là, la chanson a été tellement entendue partout que ce n’est plus fédérateur de la chanter, c’est juste irritant. »

Pas de « vrais » guitaristes

Yaël, qui donne des cours de guitare rock à Paris, va plus loin et estime que Wonderwall est « un révélateur de mauvais guitaristes. Quand quelqu’un chante Wonderwall en soirée, neuf fois sur dix, le mec n’est pas vraiment guitariste, il veut juste chanter. La guitare ne sert qu’à faire le silence autour de lui au moment où il chante… »

Pour cet amateur de Blur, il y a quelques chansons « maudites » qui distinguent « vrais » et « faux » guitaristes. « Les guitaristes amateurs, ceux qui reprennent No Woman No Cry en braillant, n’ont aucune originalité, aucune culture musicale. J’ai vu des centaines de gars arriver à mes cours avec une liste d’une vingtaine de chansons qu’ils voulaient apprendre à jouer, toujours les mêmes. C’est pathétique. »

« Because maybe » on ne peut pas finir sur une note aussi négative, rappelons tout de même que Wonderwall est une formidable chanson qui a été élue « » en 2016. Et il faudra être sacrément rabat-joie pour ne pas brailler « And after aaaaaaall/You’re my wonderwaaaaall » lors des futurs concerts d’Oasis.