logo

Livres, mangas, BD… Comme le foot ou les séries, le monde de l’édition face au fléau du piratageSportuneBébés et MamansMinutes Maison Livres, mangas, BD… Comme le foot ou les séries, le monde de l’édition face au fléau du piratageSportuneBébés et MamansMinutes Maison

Livres, mangas, BD… Comme le foot ou les séries, le monde de l’édition face au fléau du piratageSportuneBébés et MamansMinutes Maison

Jérôme Gicquel 12 Sep 2024,16:40

C’est un peu son rituel au retour des vacances depuis quelques années. A chaque , Lucie* épluche la liste des nombreuses sorties à venir et coche les romans qui lui font le plus envie. Mais plutôt que de pousser la porte d’une librairie, la trentenaire s’en va faire son marché en toute illégalité dans les entrailles du Web, téléchargeant tout un tas de livres numériques pour nourrir sa liseuse. « Je sais que ce n’est pas bien et que c’est du vol, mais mon budget ne me permet pas de faire autrement, concède-t-elle. J’emprunte aussi des livres à la bibliothèque mais c’est galère de trouver les romans les plus attendus, car il y a toujours une liste d’attente ».

Comme les amateurs de foot, de séries TV ou de films, les lecteurs sont de plus en plus nombreux pour assouvir leur soif d’ebooks. Mais difficile de savoir combien. Selon une étude de l’Hadopi, devenue l’Arcom, 22 % des lecteurs de livres numériques s’étaient fournis illégalement en 2021, un taux en hausse de quatre points par rapport à 2020. Pour se gaver de fichiers PDF, ces derniers n’ont d’ailleurs que l’embarras du choix avec toute une flopée de sites de téléchargements illégaux que l’on trouve assez facilement sur la Toile, même sans être un geek.

Un catalogue de 22 millions de livres sur Z-Library

Parmi ces gros dealers numériques, on retrouve Z-Library, considérée comme la plus grosse clandestine du monde. Sur sa page d’accueil, le site se vante d’avoir en catalogue plus de 22 millions de livres et 85 millions d’articles (dont la plupart piratés, cela va de soi). Fondé en 2009 par deux Russes - arrêtés en novembre 2022 en Argentine, mais qui ont depuis réussi à s’évader de la prison de Cordoba –, Z-Library est un peu l’ennemi numéro 1 pour tous les éditeurs à travers le monde. Le FBI avait réussi à fermer temporairement le site en 2022, mais il avait fait son retour quelques mois plus tard via d’autres sites miroirs.

Dans le viseur des éditeurs, la gigantesque librairie pirate Z-Library propose un catalogue de plus de 22 millions de livres.  - Capture d'écran Z-Library

En France, le Syndicat national de l’édition (SNE), qui regroupe plus de 700 maisons d’édition, a lui aussi obtenu devant la justice, toujours en 2022, le blocage de 209 noms de domaines ; ils renvoyaient tous sur cette même bibliothèque virtuelle, qui se targue de vouloir « rendre le savoir accessible et gratuit ». Mais telle une hydre, quand la tête d’un site pirate est coupée, d’autres repoussent à sa place.

« Les voleurs toujours en avance sur les gendarmes »

Courant juin, le SNE a donc de nouveau engagé une procédure judiciaire pour réclamer que 98 URL supplémentaires, toutes liées à Z-library, soient interdites d’accès en France. « Le piratage de livres porte atteinte à la rémunération des créateurs : auteurs et éditeurs. Il constitue une menace pour l’ensemble de l’écosystème du livre, notamment des libraires, et nuit à la diversité culturelle », estime le SNE. Mise en délibéré, la décision sera rendue ce jeudi par le tribunal judiciaire de Paris.

Spécialiste du monde du livre, Jean-Yves Mollier espère bien sûr que la justice donnera raison aux acteurs de l’édition. Mais il faudrait être naïf pour croire que le blocage de ces sites miroirs mettra fin au piratage. « C’est un combat sans fin et d’autres sites prendront le relais, assure l’historien, qui enseigne à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. On dit toujours que les voleurs ont toujours un coup d’avance sur les gendarmes ». Selon lui, le cas de Z-library n’est d’ailleurs pas nouveau. « En leur temps, le projet Gutenberg et Google Books ont été poursuivis pour piratage avant de faire le ménage », indique-t-il.

Les mangas massivement piratés

Face à ce fléau, les éditeurs français essaient de riposter. Par des actions devant les tribunaux, on l’a vu, mais aussi grâce , afin de traquer les fichiers piratés. « Ils essaient mais sans mettre beaucoup de moyens, souligne Jean-Yves Mollier. Car le piratage ne met pas pour l’heure en péril le monde de l’édition. Les livres numériques ne représentent que 10 % des ventes en France. Donc aussi longtemps que les éditeurs vendront autant de livres papiers, il n’y aura pas de risque pour le secteur ».

en sont d’ailleurs un bon exemple. Même si les ventes ont un peu reculé l’an dernier, ce segment continue de bien se porter dans l’Hexagone, deuxième pays consommateur derrière le Japon. Le piratage de mangas est pourtant massif. A peine publiés, les œuvres sont scannées, diffusées en ligne et téléchargées à la pelle. « Le piratage est bien ancré chez les lecteurs, reconnaît Dorian, qui anime sur YouTube. C’est d’ailleurs ce qui a permis au manga de se démocratiser en France ».

S’il reconnaît avoir franchi la ligne jaune « quatre ou cinq fois », mais « seulement pour des titres qui ne sont plus imprimés depuis des années ou qui sont introuvables dans les offres légales », il ne défend pas pour autant la pratique. « Surtout que des offres légales et gratuites existent même s’il n’y a pas tout, assure-t-il. Le piratage est en tout cas un débat très agité dans la communauté et chaque camp a un avis bien tranché. Certains n’ont d’ailleurs pas conscience que l’auteur n’est pas rémunéré quand on télécharge illégalement son œuvre ».

* Le prénom a été modifié à la demande de la personne interviewée.

Disclaimer: The copyright of this article belongs to the original author. Reposting this article is solely for the purpose of information dissemination and does not constitute any investment advice. If there is any infringement, please contact us immediately. We will make corrections or deletions as necessary. Thank you.