logo

« World of Warcraft » : L’enfant prodige des MMORPG en crise de la vingtaineSportuneBébés et MamansMinutes Maison « World of Warcraft » : L’enfant prodige des MMORPG en crise de la vingtaineSportuneBébés et MamansMinutes Maison

« World of Warcraft » : L’enfant prodige des MMORPG en crise de la vingtaineSportuneBébés et MamansMinutes Maison

Quentin Meunier 29 Aug 2024,00:40

Les geeks des années 2000 et 2010 en parlent encore le mieux. « L’envie de reprendre un abonnement pour un ou deux mois de m’envahit chaque année, de même que les souvenirs idéalisés d’antan, moins pour explorer les ajouts des développeurs que pour arpenter encore une fois les sentiers des lieux qui ont tant marqué mon adolescence », se souvient avec lyrisme Paul, 26 ans. Le plus connu des MMORPG (jeu de rôle en ligne massivement multijoueur) fête cette année ses vingt ans, et vient de sortir mardi une nouvelle extension, The War Within. Deux décennies qui ont défini un genre vidéoludique.

Comme Paul, qui a répondu à notre appel à témoignages, de nombreuses personnes ont des histoires, souvent longues, avec World of Warcraft (ou WoW pour les intimes). « J’ai commencé à y jouer au collège, en 2012, et j’ai passé deux ans à ne faire que cela, quitte à me lever à 4 heures du matin, détaille-t-il. J’ai développé pour ce jeu beaucoup d’amour et aussi une addiction qui a mis à mal ma relation avec ma mère et avec le collège. » « J’ai commencé à jouer après que mon père m’y a entraîné, évoque pour sa part "Nexxiss". Pendant un long moment je jouais avec lui et je pense que c’est surtout ça qui m’a fait apprécier ce jeu. Que ce soit les refontes graphiques, l’histoire ou le gameplay, le jeu était, et est toujours, en constante évolution. »

Les lettres d’or du MMORPG

Il en a fait de la route, depuis sa sortie en 2004. Le jeu de Blizzard débarque quinze ans après les premiers MMO. « Ils apparaissent aux au milieu des années 1990, de manière relativement confidentielle, avec Ultima Online ; puis arrivent assez tardivement en France », relate Vincent Berry, professeur des universités en sciences de l’éducation, spécialisé jeux et loisirs, à l’université Sorbonne Paris Nord. Selon lui, son succès est lié à la petite touche en plus de game design de la part de Blizzard. « Le studio a baissé le coût d’entrée du jeu : là où les jeux précédents étaient assez exigeants, WoW est assez épuré, il y a un gros travail sur l’interface, évoque l’expert. Le jeu s’appuie sur une licence déjà connue [les jeux de stratégie « Warcraft »] et un univers étendu. » « Le jeu a popularisé la boucle OCR : objective-challenge-reward (objectif-défi-récompense), à travers un système de quêtes journalières, détaille Antoine Chollet, enseignant chercheur à l’université de Montpellier en sciences de gestion. Ce n’est pas le premier MMORPG, mais c’est celui qui a donné les lettres d’or au genre. »

Autre aspect essentiel : le timing. Le jeu arrive au milieu des années 2000, quand l’idée de jouer aux en ligne commence à se généraliser. « World of Warcraft représente une ouverture sur le monde, souligne Antoine Chollet. Ça semble trivial de jouer en ligne aujourd’hui, mais ça ne l’était pas à l’époque. » « Sa sortie correspond à la massification d’Internet, pointe de son côté Vincent Berry. A la base, le MMO est une pratique de classe moyenne diplômée qui apprécie l’informatique et les univers de fantasy. WoW est plus populaire. Le système de paiement par carte achetée en magasin ouvre le jeu à un public adolescent. Il inclut les jeunes couples et les familles. Il est aussi marginalement plus féminin. »

World of Warcraft devient vite une grande famille. C’est un point saillant des témoignages de joueurs : dans WoW, on fait des rencontres, on échange, on s’aime. « La communauté est géniale, j’ai fait de merveilleuses rencontres dans le jeu qui ont entraîné des rencontres dans la vraie vie (barbecue tous les étés avec la guilde actuelle !) », témoigne Marie. « Toute ma famille y jouait donc on se retrouvait sur le jeu ensemble et on pouvait partager des moments sympa même quand on ne pouvait pas se voir, se souvient Sébastien. J’ai même été invité au mariage de mon maître de guilde. » Parmi plus de 2.000 joueurs interrogés dans le cadre de sa thèse sur l’apprentissage de compétences managériales dans les MMORPG, Antoine Chollet a même relevé qu’un quart des répondants ont vécu une histoire d’amour dans ce type de jeu.

Une nouvelle concurrence

Mais les joueurs ont grandi, et les vastes terres d’Azeroth fourmillent moins qu’avant. En mars, selon le média américain IGN, World of Warcraft a enregistré un pic de 7 millions de joueurs abonnés. Un nombre respectable, mais qui marque un décrochage inexorable depuis le record de 10 millions en 2010. D’abord en raison d’une concurrence croissante chez les MMO, « notamment Final Fantasy XIV, qui a profité de l’évolution des graphismes, d’un besoin pour le genre de se renouveler, et reste en vie grâce à la popularité de la franchise "Final Fantasy" », explique.

« J’ai vu se succéder une quantité énorme de tueur de WoW qui n’ont fait qu’échouer, défend James. C’est le genre du MMO qui marche moins. » L’évolution des jeux en ligne a aussi détricoté la base d’utilisateurs. «  a drainé pas mal de joueurs, puis ça a été , analyse Victor Berry. Le MMO est un genre qui a du mal à maintenir l’engouement, car il est très exigeant. League of Legends, par exemple, offre des expériences plus courtes (entre trente minutes et une heure par partie). » Enfin, la fonction sociale a elle aussi été remplacée. « Les ont repris le flambeau de ce qui était à l’époque autant un jeu qu’un salon de discussion géant avec des dragons a l’intérieur », regrette Morgan.

« Nous voulons toucher les joueurs là où ils sont »

Mais World of Warcraft ne compte pas se laisser abattre. Depuis sa sortie, le MMO sort tous les deux ans une nouvelle extension – une autre recette lucrative qu’il a perfectionnée. De quoi rafraîchir régulièrement l’expérience. « Je trouve que la dernière extension Dragonflight est l’une des meilleures qui soit, atteste par exemple Jérémy, 32 ans. Je pense que WoW a su faire les bons choix après les dernières expérimentations. » Pour contenter tout le monde, Blizzard a aussi sorti une version Classic du jeu, sans les ajouts les plus récents, qui joue la carte de la nostalgie. « Le jeu a beaucoup de charme, que l’on a essayé de maintenir tout en restant ambitieux », se félicite Holly Longdale, vice-présidente et productrice du studio.

The War Within, la dernière extension, tente de naviguer entre ambition et accessibilité. Aussi bien dans le scénario que dans les nouveautés en jeu, elle a été pensée comme la première partie d’une trilogie, avec une histoire qui se déroulera sur plusieurs années. Mais WoW cherche aussi à s’adresser aux joueurs qui ont moins de temps à consacrer au MMO, en lançant des « fouilles », des explorations de donjons express en une vingtaine de minutes. « Nous devons trouver des façons de raconter vingt ans d’histoire aux nouveaux arrivants, résume Holly Longdale. Nous voulons toucher les joueurs là où ils sont et quand ils ont envie de jouer. »

Malgré cette recherche d’un second souffle, l’impact de World of Warcraft continuera de se faire ressentir. « Il a marqué une génération, conclut Antoine Chollet. Il y a eu des mèmes, un épisode de South Park, un hommage à Robin Williams, dans le jeu… Par rapport à d’autres MMO, WoW est riche sur ce plan-là. » Dans le cœur des joueurs aussi : « Je pense que je jouerai à ce jeu jusqu’à la dernière heure des serveurs », s’émeut Jérémy. On espère que ce sera le plus tard possible.

Disclaimer: The copyright of this article belongs to the original author. Reposting this article is solely for the purpose of information dissemination and does not constitute any investment advice. If there is any infringement, please contact us immediately. We will make corrections or deletions as necessary. Thank you.